Le vendredi canadien est décidément atypique par rapport aux autres vécus durant la saison. Le spectre d’un départ par le bas pour Charles Leclerc pousse Ferrari à un programme de travail inédit, limitant les possibilités d’affrontement avec Red Bull, qui à son tour se retrouve retardé avec la voiture de Sergio Perez. Max Verstappen semble donc se diriger vers un départ facile depuis la pole position, mais les variables et les thèmes d’intérêt ne manquent pas. Tout d’abord, le champion du monde en titre devra vaincre la résistance de Carlos Sainz, sans négliger la probable remontée de son coéquipier, un succès qui n’est absolument pas à prendre pour acquis. La RB18 se confirme en effet toujours incapable d’optimiser les performances sur le tour lancé au niveau de la F1-75, facteur auquel s’ajoute l’évolution imprévisible de la piste soumise aux caprices de la météo. En parallèle, il faudra suivre le travail de préparation de Charles Leclerc, appelé à réaliser une remontée difficile de la dernière place au moins jusqu’aux épaules des trois premiers. Il a été dit que l’objectif pour le Cavallino sera au moins de maintenir l’écart au classement des pilotes inchangé jusqu’à la pause estivale, puis d’essayer de construire la course au championnat du monde avec une voiture déjà incontestablement compétitive, mais qui devra également pouvoir compter sur une fiabilité retrouvée. Ainsi, pour Leclerc à Montréal, il devient prioritaire de limiter les dégâts, puis d’essayer d’amortir le coût des pénalités canadiennes dans les prochains tours.
Les premières séances d’essais libres confirment la piste canadienne comme l’une des plus exigeantes de toutes en ce qui concerne le passage sur les bordures. La nécessité de tailler agressivement les chicanes, notamment la dernière flanquée du mur des champions, impose des choix de réglages mécaniques plus souples, opération délicate compte tenu de la rigidité intrinsèque des monoplaces actuelles indispensable pour optimiser la génération de charge du fond. Tout cela se reflète dans les déclarations de plusieurs conducteurs, qui se sont plaints du comportement trop rigide de leurs voitures dans les sauts et les rebonds sur les vibreurs. À Montréal, il ressort aussi flexibilité de garniture, compris comme la possibilité d’opérer dans une large gamme de réglages mécaniques sans compromettre les performances aérodynamiques de la voiture. Ferrari a fait de cette qualité l’une des pierres angulaires du projet 2022, se traduisant pas par hasard dans d’excellents passages à la dernière chicane.
Une réflexion complémentaire de nature générale est le travail difficile de compromis sur les réglages en fonction de la météo et de l’évolution de la piste. L’attente d’un samedi sous l’eau incitera les équipes à corriger l’équilibre optimal, en sacrifiant le moins possible les performances sur le sec pour ne pas subir un retard excessif lors des qualifications humides. Il sera tout aussi difficile de pouvoir prédire un set-up compétitif sur sol sec sur une piste qui perdra une partie des pneus résiduels sous la pluie, pour se regonfler en course, affectant l’équilibre des voitures. Tout cela se déroule dans l’imprévisibilité d’un contexte climatique où les températures de l’asphalte risquent de fortement différer d’un jour à l’autre du week-end. Par conséquent, la recherche de l’équilibre ne suivra pas une ligne droite, car le résultat final sur la voiture dépendra grandement des conditions environnantes.
Entrer dans les mérites des équipes individuelles, Redbull il s’est montré compétitif dès le départ avec Max Verstappen, une situation qui n’est pas seulement le résultat de l’efficacité aérodynamique et de la vitesse en coup droit. En fait, la RB18 a été la voiture qui s’est tout de suite retrouvée à l’aise dans le premier secteur, où la mécanique et la charge aérodynamique émergent entre l’épingle initiale et la chicane, la F1-75 n’atteignant les niveaux de sa rivale qu’à un plus tard. Il est également intéressant de noter comment sur une piste qui, bien que rapide, nécessite toujours des niveaux de charge plus élevés que Bakou, l’équipe de Milton Keynes a confirmé l’aile poutre à profil unique vue en Azerbaïdjan. C’est une indication de l’efficacité croissante du bas du RB18, qui a atteint un tel point que sur certaines pistes, afin de réussir à extraire les flux du diffuseur, il nécessite moins de dépression générée par les appendices d’aile dans la voiture arrière. . Chez Red Bull, cependant, il y a encore quelques problèmes pour optimiser le tour lancé : Perez se plaint de difficultés de réglage avec une faible charge de carburant, tandis que Verstappen ne parvient pas à extraire le maximum de potentiel une fois les pneus tendres montésprobablement encore aux prises avec le manque de stabilisation des pressions des pneus avant.
Chez Ferrari, deux programmes de travail différents ont été menés en fonction des différentes courses que les pilotes seront appelés à affronter. Carlos Sainzexempt de peine, il pourra tenter d’exploiter les écarts partiels sur l’unique tour de Red Bull pour décrocher la pole position ou du moins mettre la pression sur les adversaires en termes de qualifications, en évitant de leur laisser trop de liberté de réglage pour optimiser le rythme de course. Leclerc, en revanche, puisque la FP1 a privilégié le travail en vue de la course, un programme qui ne l’a cependant pas empêché de se rapprocher de Max Verstappen dans le tour lancé de l’après-midi, confirmant la compétitivité de la F1-75 en Le Canada aussi. Les petits signes avant-coureurs proviennent de l’usure excessive des pneus arrière a émergé lors du relais simulé de la première séance, mais Leclerc aura le temps nécessaire pour peaufiner un set-up qui, avec des pénalités, ne devra pas être compromis avec la qualification et avec la pluie attendue samedi après-midi.
Les faits saillants du groupe central l’excellent état de forme d’Alpine et d’Aston Martin. Les deux équipes avaient déjà bien performé à Bakou, mais Montréal se présente comme une piste plus véridique et représentative, où les qualités mécaniques et la charge aérodynamique importent davantage. Malgré les excellentes simulations de rythme de course, il est difficile pour les AMR21 et A522 d’inquiéter la tête de la classe, mais ils pourraient encore s’avérer des adversaires coriaces en vue du retour probable de Leclerc. Alpine et Aston Martin devront encore se confirmer dans la course, considérant également que l’équipe anglo-française en particulier a tendance à concourir le vendredi avec une approche plus agressive, mais les signes de croissance après les dernières mises à jour sont indéniables. Alpine confirme les nouveaux côtés introduits à Bakou, tandis qu’Aston Martin continue d’optimiser le package qui a fait ses débuts en Espagne, déployant désormais une voiture sur la piste méconnaissable par rapport à celle incapable de marquer un point lors des trois premières courses de la saison.
La croissance d’Alpine et d’Aston Martin contraste avec le cadre technique stable à la maison Mercedes. Les Flèches d’Argent démontrent encore une fois qu’ils peuvent prétendre au rôle de troisième force au Canada, mais le manque de progression vers le sommet de la classe inquiète. Un nouveau fond a été testé sur les W13 à Montréal, mais l’impression est qu’aucune mise à jour n’apporte d’améliorations à la voiture, en utilisant une expression similaire à celle utilisée par Lewis Hamilton. La principale préoccupation est de savoir quelles perspectives le projet 2023 peut être fixé, même si nous voulons réorienter les efforts et les ressources de la voiture actuelle vers celle de la saison prochaine. S’il est vrai que l’expérience signifie apprendre de ses erreurs, l’équipe de Brackley ne pourra guère revenir au sommet si l’origine des problèmes de W13 n’est pas d’abord comprise, non seulement en termes de rythme, mais surtout en termes de stabilité, équilibre et prévisibilité en réponse aux changements d’attitude. La résurgence des champions en titre devra forcément passer par là aussi.