Journée chaude en Principauté, l’asphalte culminant à 47°C. La Formule 1 change, mais le Grand Prix de Monaco reste une source intarissable d’idées à partir de vendredi, rappelant pourquoi c’est l’un des circuits les plus exigeants au monde. Par exemple, le champion du monde est passé de la misère à la richesse, se hissant en tête du classement après un départ pénible, mais sans pouvoir dormir paisiblement. Comme on pouvait s’y attendre, les deux Ferrari sont très proches dans le tour lancé et auront leurs cartes à jouer comme Alonso. Cependant, les thèmes de vendredi émergent également de la voie des stands, où la masse de mises à jour en dit long sur les dernières tendances sur la grille.
Combat à quatre
L’impression qui se dégage de vendredi à Monte-Carlo est que la lutte pour la pole position et très probablement pour la victoire sera une affaire à quatre entre Verstappen, Alonso et les deux Ferrari. Le champion du monde a participé à la première séance d’essais dans la crise la plus absolue, se plaignant d’une voiture inconduisible notamment dans les sections les plus rapides. Le RB19 rebondit fréquemment contre le sol, avec pour conséquence de déstabiliser l’aérodynamisme du fond et de perdre en charge. D’une part, la Red Bull est née comme une voiture plus basse et plus rigide que la concurrence, avec donc un plus grand risque d’impacter la surface de la route. En revanche, justement en prévision de l’asphalte cahoteux de Monaco, les techniciens de Milton Keynes semblent avoir assoupli la suspension pour surélever la voiture, avec pour résultat de rebondir davantage sur les bosses. Dans tous les cas, l’équipe a ensuite procédé à la modification de la configuration et les améliorations ont été constatées. Non seulement Verstappen a pris la tête du classement, mais il a également limité les communications radio à des réglages de différentiel détaillés, signe d’une voiture beaucoup plus stable.
Charles Leclerc s’est également plaint des sauts sur les bosses monégasques. Numéro 16 décrit une situation de conduite très critique à l’épingle Mirabeau – virage 5 – jusqu’au point où la roue intérieure ne touche pas l’asphalte. Le Monégasque a rattrapé 1 dixième à droite dans le secteur central à Carlos Sainz, qui a au contraire imprimé le meilleur temps intermédiaire. Le set-up parfait n’existe pas de toute façon, à Monaco notamment, mais il dépend aussi du style de pilotage et des lignes suivies par les pilotes. De la vue de la salle de presse sur la Rascasse on peut apprécier les différences entre ceux qui élargissent la trajectoire à l’entrée, pénalisant l’entrée, et ceux qui la raccourcissent davantage, traversant une petite dépression et déstabilisant la voiture. Aux basses vitesses de Monaco et donc sans charge aérodynamique, les sauts sur les bosses s’accentuent, obligeant pilotes et écuries à trouver le bon compromis entre trajectoires et réglages de réglages.
On a dit de Carlos Sainz, excellent troisième en fin de journée et avec le meilleur temps du secteur central. L’Espagnol préfère les contextes dans lesquels l’arrière est plus stable en sortie de virage, une qualité soulignée par le set-up monégasque qui recherche la motricité dans les virages en épingle. L’accident à la deuxième des piscines ce n’est pas forcément une indication négative, mais aussi une possible confirmation d’un pilote à l’aise avec la voiture qu’il a essayé de pousser en avance. Des performances similaires étaient attendues de Sergio Perez, qui est aussi généralement plus à l’aise avec un arrière moins rebondissant, mais pour le moment le Mexicain semble éloigné de son coéquipier.
Aston Martin reine du premier secteur
Fernando Alonso a terminé à la quatrième place le vendredi de ce Grand Prix perçu comme la grande opportunité de la victoire numéro 33. Son Aston Martin est confirmée parmi les voitures avec des charges verticales plus élevées et plus stable dans les virages plus longs. L’Espagnol a été en moyenne le plus rapide du premier secteur, le seul du circuit de Monaco avec des virages suffisamment rapides pour pouvoir juger du comportement aérodynamique. Même Lance Balade, en crise profonde en fin de journée, a signé des chronos respectables entre Sainte Dévote, Massenet et Casino. Alonso a davantage souffert dans le deuxième secteur, pour ensuite s’aligner sur Verstappen et les deux Ferrari dans la dernière ligne droite. Au bout du compte, en effet, on remarque comment les quatre premiers sont sur des temps pratiquement identiques entre le second de la Piscine, la Rascasse et Antony Noghes.
Mercedes clôture vendredi avec un peu trop de difficultés. Cependant, attribuer la responsabilité aux mises à jour serait une erreur, celles-ci étant presque injugables avant Barcelone. Le W14, en revanche, est connu pour souffrir de températures élevées, qui accentuent l’instabilité chronique de l’arrière. Lewis Hamilton lui-même s’est plaint d’une surchauffe des pneus arrière, mais il faut préciser que le multiple champion du monde a roulé avec un set-up différent de celui de son coéquipier. De plus, l’équipe n’a pas une histoire encourageante depuis ces dernières années à Monaco, signe cependant d’une équipe qui peine à interpréter la piste monégasque, une tendance plus que commune qui s’est également affirmée avec d’autres équipes sur d’autres pistes.
L’un des protagonistes de Monaco vendredi est Lando Norris, qui sur une piste « pilote » sembleraient affirmer leurs compétences au volant. Le MCL60 manque surtout d’appuis, ce qui conduit l’Anglais à accumuler une grande partie de son désavantage dans le premier secteur plus rapide. La monoplace Woking, en revanche, s’est bien comportée dans les deux secteurs les plus poussés, un indice qui révèle un bon niveau de grip mécanique dans les spéciales lentes.

Mettre à jour qui peut
La grande particularité de cette édition du Grand Prix de Monaco est la quantité de mises à jour apportées par les équipes. L’annulation de l’événement d’Imola a reporté les innovations initialement prévues pour l’Émilie-Romagne, mais on ne peut s’empêcher d’être étonné par la hâte et l’envie de ne pas attendre la Barcelone plus traditionnelle. Dans le cas d Ferrari, une partie de la décision provient également d’une stratégie de développement fractionnée qui, selon Vasseur, vise à introduire des mises à jour à chaque course d’ici juillet. L’impression est que Maranello veut isoler toutes les variables possibles, en faisant un changement à la fois pour étudier la réponse de la voiture et comprendre ses problèmes.
Situation diamétralement opposée dans la maison Mercedes, qui, selon la tradition, a introduit un seul gros paquet de mises à jour. La W14 change de concept et repart quasiment d’une feuille blanche sur laquelle mettre en place le projet 2024. A Monaco cependant, d’autres équipes ont également modifié leurs flancs, voir Alpine et Alfa Roméobien que sous une forme moins frappante. Deux ans après les débuts de la réglementation sur l’effet de sol, il est désolant que de nombreux ingénieurs aient d’abord affirmé que les côtés avaient peu d’influence sur les performances. Cependant, les dernières mises à jour, même de la part de ceux qui avaient déjà modifié leur concept, semblent témoigner d’une prise de conscience différente des designers.