Une nouvelle Hypercar s’apprête à rejoindre le Championnat du Monde d’Endurance. Isotta Fraschini revient à la course et le fait avec la Tipo 6 Competizione, une hypercar hybride à quatre roues motrices créée en collaboration avec Michelotto Engineering. La maison milanaise embrasse le dicton « gagner le dimanche pour revendre le lundi », misant sur le Championnat du Monde d’Endurance pour relancer la marque historique sur le marché. Ce n’est pas un hasard si la Tipo 6 est également née dans les versions Pista et Strada destinées à la vente, même si l’intérêt des sportifs en ce moment se porte entièrement sur la Competizione.
Moteur et mécanique
L’épine dorsale de la Tipo 6 est le châssis monocoque en fibre de carbone, produit par l’italien ARS Technologies, tout comme la carrosserie extérieure. Le corps abrite le moteur thermique, conçu avec une feuille de papier vierge par HWA et Michelotto Engineering, qui détient la propriété intellectuelle. Pour l’architecture, il a été décidé de recourir à un V6 de 3 litres, une cylindrée similaire à celle de la Ferrari qui en fait le moteur le plus compact de la grille derrière seulement la Peugeot, essayant ainsi de réduire au maximum la dispersion des masses pour faciliter la réactivité lors des changements de direction. L’angle entre les deux rangées de cylindres est de 90°, contrairement aux 120 et 180° de certains concurrents, Isotta Fraschini payant donc un centre de gravité du moteur un peu plus élevé, à l’avantage toutefois de la compacité latérale. Le V6 est suralimenté par un seul turbocompresseur, un choix atypique dans la grille WEC, où Vanwall et Cadillac montent des unités à aspiration naturelle tandis que le reste de la grille adopte deux turbocompresseurs. L’abandon du biturbo rend la gestion du turbo-lag plus complexe, car le compresseur unique est plus gros et avec une plus grande inertie, mais permet de réduire à nouveau le poids et l’encombrement. C’est dû au monoturbo le son typique des V6 de Formule 1, comme apprécié lors du shakedown de Vallelunga. Enfin, grâce à la transmission réalisée par Pankl, le thermique est couplé à la boîte de vitesses Xtrac transversale à sept rapports.
Contrairement aux autres petits constructeurs du WEC tels que Glickenhaus et Vanwall, Isotta Fraschini choisit de jouer gros et de monter un groupe motopropulseur hybride à quatre roues motrices, sans craindre les coûts et les complexités technologiques. La batterie lithium-ion 900V a été créée en synergie avec Williams Advanced Engineering, tandis que le bloc moteur électrique-onduleur porte la signature Helix. Le moteur électrique est une unité synchrone triphasée à aimants permanents et trouve sa place sur le train avant, offrant à la Tipo 6 une transmission intégrale utilisable conformément à la réglementation au-delà de 190 km/h. Logiciel de gestion hybride il a été écrit en interne dans les laboratoires de Padoue, un autre élément qui fait de la Tipo 6 une Isotta Fraschini à toutes fins utiles et non un simple assemblage de composants externes. L’aspect logiciel est crucial sur les prototypes hybrides et la stratégie de livraison de puissance pendant le tour en dépend, ainsi que la coopération entre les deux moteurs. Globalement, la Tipo 6 atteint les 520 kW de puissance maximale accordée par la réglementation, soit environ 700 chevaux, avec le moteur électrique qui peut fournir jusqu’à 200 kW.
Freins, pneus et suspension
Pour le système de freinage, la Tipo 6 monte des composants Brembo, avec des freins carbone-carbone. Des étriers à six pistons sont situés sur l’essieu avant, tandis que des unités plus petites à quatre pistons sont montées à l’arrière. En ce qui concerne l’unité de contrôle de la voiture, la société milanaise choisit de s’appuyer sur l’expérience de Bosch. Comme les autres Hypercars homologuées à partir de 2023, Isotta Fraschini ne pouvait opter que pour les pneus plus étroits de 290 mm sur l’essieu avant, avec des bandes de roulement de 340 mm à l’arrière. La même configuration est adoptée par toute la concurrence, à l’exception de Peugeot qui continue avec les quatre pneus de 310 mm. La disposition des suspensions est le quadrilatère classique à double triangulation et barres de torsion, avec le groupe ressort amortisseur interne développé par Multimatic. La mécanique interne suscite un certain intérêt, grâce aux images publiées par Isotta Fraschini depuis les stands de Vallelunga et aux rendus mis en ligne sur le site du constructeur milanais. En effet, on constate qu’à l’arrière, sous le poussoir, les amortisseurs de la roue unique sont placés à la verticale, sur les flancs de la boîte de vitesses, tandis que le reste du groupe reste caché avec les barres anti-roulis et le éléments anti-tangage. Cependant, il est intéressant de noter comment Isotta Fraschini a développé une disposition différente, à la recherche d’un compromis entre les dimensions internes et les rapports mécanismes cinématiques-transmission.
L’aérodynamique
Les premiers kilomètres parcourus à Vallelunga nous ont permis d’apprécier l’aspect aérodynamique extérieur de la Tipo 6, dont nous avons eu un avant-goût lors de la présentation à Milan. Toujours pour le développement aérodynamique, Isotta Fraschini a fait appel au conseil de Williams Advanced Engineering. En tout les solutions sont de nature classiquesans aileron avant sur le nez comme Vanwall mais sans même renoncer à l’aileron arrière comme Peugeot.
Pour le moment, la partie avant n’a pas d’avions de plongée, utilisés à la place par Toyota. Le séparateur avant a la forme d’un véritable profil aérodynamique, mais sans une cascade d’éléments comme sur la Ferrari 499P. Toujours de la vue de face, ils peuvent être vus les évents de frein avant montés directement sur les ensembles de roues, au lieu d’être obtenu à l’intérieur de la carrosserie avant comme sur certains concurrents. Le choix remonte à la Formule 1, dans laquelle Isotta Fraschini a évidemment trouvé des avantages dans la possibilité de concevoir les conduits internes, de refroidir les freins et en même temps de gérer le transfert de chaleur vers les pneus.
De la vue latérale, vous pouvez voir comment le Type 6 se conforme au schéma de refroidissement le plus courant, avec les bouches d’aération du radiateur à mi-hauteur sur le côté, sans s’étendre dans le nez comme cela se produit dans le 499P à la place. Les radiateurs sont développés par PWR, une société qui joue en Formule 1 et qui collabore également avec d’autres équipes du WEC. juste derrière, le ventre a été creusé en bas, accélérant le flux vers l’extérieur des roues arrière. Les rétroviseurs, quant à eux, se détachent sur les passages de roue avant, exploitant leurs supports avec une fonction aérodynamique. Enfin, les entrées d’air pour les freins émergent des passages de roue arrière.
En tête de cockpit, l’entrée d’air est divisée en deux canaux: le canal supérieur sert au refroidissement de la boîte de vitesses, tandis que le canal inférieur alimente le turbo et donc le moteur thermique. Tout peut être apprécié à partir des images nues de la Tipo 6 dans les stands, où l’on peut également voir les radiateurs latéraux couchés et les amortisseurs verticaux de la suspension arrière.
A l’arrière, la Tipo 6 affiche les plus grands évents pour la libération de la pression des roues, qui restent presque découverts. Le diffuseur, quant à lui, a un contour curviligne et parmi les autres voitures de la grille, du moins du périmètre extérieur, il fait référence aux formes du champion du monde Toyota.
Dans l’ensemble, Isotta Fraschini n’a épargné aucune dépense et a conçu en interne une Hypercar hybride à partir d’une feuille blanche. Le soutien de partenaires de haut calibre est de bon augure pour l’avenir, tandis que les logiciels écrits en interne pour l’hybride et certains choix mécaniques à contre-courant, comme le V6 mono-turbo, attisent la curiosité. Le succès de la Tipo 6 dépendra aussi de l’évolution de la voiture au fil des essais en piste, Isotta Fraschini ayant pour objectif de faire ses débuts à Monza, sans toutefois exclure de reporter les débuts. En revanche, il semble difficile de boucler les plus de 20 000 km d’essais réalisés en deux fois plus de temps par Porsche et Ferrari en trois mois, qui ont d’ailleurs fait appel à plus d’une voiture. La comparaison est avec les géants du sport automobile, mais c’est vers eux qu’Isotta Fraschini doit se tourner, compte tenu de l’ambition de gagner.