Trois constructeurs différents sont montés sur la plus haute marche du podium lors des trois dernières courses. DS a triomphé en Inde, Porsche a repris le devant de la scène au Cap, tandis que Jaguar a tout simplement dominé à São Paulo. Les groupes motopropulseurs allemands ont été les plus performants de cette première phase de l’ère Gen3, avec trois succès de Porsche et un d’Avalanche Andretti. Pourtant, le dernier E-Prix démontre à quel point l’évolution des réglages et le développement logiciel réécrivent les rapports de force, rééquilibrant un groupe qui promet de belles batailles d’ici la fin du championnat.
Porsche apprécie son logiciel
La maison de Stuttgart ne pouvait guère espérer un meilleur début de championnat. Les essais de pré-saison à Valence n’avaient pas été des plus encourageants, les moteurs DS apparaissant comme référence, une impression qui se dégageait non seulement des feuilles de temps, mais aussi des sensations des initiés. Pourtant, plus d’un mois s’est écoulé depuis les essais de début de championnat, un temps parfaitement exploité par Porsche pour mettre à profit les données récoltées sur la piste en Espagne. Les monoplaces allemandes semblaient à la fois le plus rapide de la course et le plus économe en énergie, deux aspects qui ne sont jamais sans rapport en Formule E. En fait, une voiture stable et solidement ancrée au sol, en plus de rouler et de sortir des virages plus rapidement, subit moins de patinage des pneus, économisant ainsi de l’énergie qui serait autrement perdue. Ce n’est pas un hasard si les communications radio des ingénieurs mettent souvent l’accent sur des vitesses minimales au sommet, car une vitesse plus élevée signifie également moins d’énergie dépensée pour réaccélérer à la sortie.
Avec la Gen2, Porsche a été l’auteur de performances discrètes en qualifications, mais a ensuite manqué de rythme en course, avec pour résultat d’être résorbé par le groupe. La situation s’est complètement inversée avec le groupe motopropulseur de troisième génération. L’équipe de Stuttgart a travaillé sur les réglages de suspension, avec l’exploitation des pneus Hankook devenir une clé de lecture importante. En effet, les nouveaux pneus se sont avérés particulièrement durs et difficiles à mettre en température, un processus qui peut nécessiter jusqu’à dix tours. En même temps, cependant, leur exploitation doit être mesurée, car ils continuent à montrer un soupçon de dégradation vers la fin de la course. Cependant, un autre domaine dans lequel Porsche fait la différence est le logiciel permettant de fournir la puissance d’entraînement en accélération. Le contrôle de traction est interdit par la réglementation, mais il appartient toujours à l’équipe de développer un logiciel qui établit la puissance et le couple que le moteur électrique délivre en fonction du régime moteur et de la demande sur la pédale. Comme pour les moteurs thermiques traditionnels, il va sans dire qu’un groupe motopropulseur plus docile et plus maniable limite le patinage des roues en sortie de virage, ce qui profite à la fois au temps au tour et aux économies d’énergie.
Jaguar en convalescence
Le constructeur britannique a été la référence lors de la dernière course au Brésil, le podium étant monopolisé par les voitures d’usine d’Evans et Bird, séparées par les Envisions à moteur Jaguar de Cassidy. Le motoriste anglais était très à l’aise sur le circuit de San Paolo, montrant des qualités similaires à celles de la voiture de deuxième génération : freinage en ligne droite, absorption des chocs et agilité dans les virages serrés. Cependant, comme l’a souligné Mitch Evans, pour le moment, il est difficile de dire à quel point le succès au Brésil a été facilité par la piste et à quel point par un développement qui rend Jaguar plus compétitif à l’échelle mondiale. En effet, la réglementation permet de mettre à jour le logiciel de gestion du groupe motopropulseur à chaque course, à ne pas confondre avec la cartographie des accélérateurs, et un temps considérable s’est écoulé depuis l’E-Prix d’Afrique avant Sao Paulo, près d’un mois. De plus, lors des manches précédentes, les Jaguar s’étaient montrées compétitives, mais elles n’avaient pas eu l’opportunité d’exprimer réellement leur potentiel. Une erreur de freinage de Sam Bird en Inde a mis les deux voitures hors de combat, tandis qu’au Cap, Evans a été pénalisé pour surpuissance. Les deux prochains arrêts à Berlin révéleront donc combien Jaguar a réellement grandi depuis le début de l’année. En fait, la piste allemande a toujours été indigeste pour les groupes motopropulseurs britanniques pendant la Gen2, avec ses virages larges et un asphalte très agressif sur les pneus qui vous oblige à régler la voiture de manière inhabituelle.
DS silencieux
En 2023, l’entreprise française souffre de la fin de la collaboration historique avec Techeetah, s’appuyant sur Penske pour la gestion des voies, un tout nouveau partenaire avec qui l’harmonie ne peut que grandir. Après un début difficile, Vergne a gagné en Inde pour prendre de gros points et deux semaines plus tard à Cape Town, il est venu près d’un rappel, battu à la dernière minute par la Porsche de Da Costa. D’une part, les performances qualificatives convaincantes de Maserati attestent de la compétitivité du package matériel, tandis que le développement logiciel n’est pas comparable, étant réalisé indépendamment par les deux constructeurs. Les cinquième et sixième places au Brésil certifient un groupe motopropulseur constamment parmi les trois premières forces avec Porsche et Jaguar, avec une équipe et des pilotes capables de maximiser toutes les opportunités disponibles.
Une nouvelle pause d’un mois sépare les courses de San Paolo et de Berlin, une période au cours de laquelle le développement de logiciels et l’analyse de données sur les réglages se poursuivront sans relâche. Pour Porsche travaillera en priorité sur les qualifications, le domaine où il lui manque le plus jusqu’à présent par rapport à ses rivaux, même si le Team Principal Modlinger s’est dit satisfait des progrès réalisés. En tout cas, l’impression est que le rapport de force entre les trois constructeurs fluctuera continuellement en faveur de l’un ou de l’autre selon les pistes, net des variables externes. L’un d’eux pourrait être les arrêts aux stands de charge rapidenouvelle technologie qui va aussi changer la gestion stratégique des courses, annoncée par la FIA et la Formule E pour la seconde moitié du championnat.