Que nous ne puissions pas vivre dans le passé sans conduire à l’anachronisme, c’est bien établi. Mais quand la modernisation devient un bouleversement, il est juste de se demander si la voie empruntée est la bonne. La Formule 1 est une charmante de 71 ans qui lentement, au lieu de montrer fièrement ses rides, intervient chirurgicalement ici et là. Pour rester dans l’air du temps et de la modernité, faire un clin d’œil aux plus jeunes, effacer les signes du temps. Mais quand on en fait trop avec les tweaks, il y a un vrai risque de ne plus se reconnaître dans le miroir, de perdre le contact avec la réalité. Et de donner aux plus jeunes quelque chose de très artificiel et de complètement déconnecté du passé.
Au cours des 20 dernières années, nous avons vu un peu de tout. Avec un pincement sur les pommettes ici et là le Warm Up a été éliminé, avec un autre les tests gratuits ont été salués, et puis – sans ordre particulier – voici le DRS pour les dépassements façon jeu vidéo comme une belle poitrine refaite qui défie la gravité , le mille changements aux qualifications (de la chaise chaude à la somme des temps) comme des tests de maquillage de plus en plus extrêmes. Et voici des vêtements de plus en plus audacieux avec des fentes vertigineuses, comme le Sprint Qualification qui donne la pole non plus au plus rapide sur le tour lancé mais au vainqueur d’une course courte. Les talons aiguilles prennent alors la forme de la règle du parc fermé – malheur de toucher ces voitures – et ce que vous voyez le samedi doit correspondre exactement au dimanche. Sinon, les spectateurs s’embrouillent.
Et les pattes d’oie ? Repassez ceux-là aussi, adieu le traditionnel jeudi sur la piste de Monte-Carlo. Les lèvres deviennent saillantes et voluptueuses, faisant un clin d’œil aux jeunes pour les mettre sur la piste « obligatoirement » lors de certains essais libres en 2022. Et ne donnons-nous pas des fesses plus fermes ? Oplà, partageons les championnats et proposons le Grand Chelem avec le titre des pilotes F1 et le titre F1 Sprint.
Puis on met les deux 71 ans dans le miroir : d’un côté il y a un corps sincère, avec quelques rides et un sourire naturel ; de l’autre un artificiel, futuriste et retouché, qui, lorsqu’il sourit, semble faire une grimace contre nature. Mais il dit qu’il est dans l’air du temps.
Est-ce la vraie vie?
Est-ce juste un fantasme ?
Pris dans un glissement de terrain,
Pas d’échappatoire à la réalité.